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La blogosphère de Charline à Kinshasa
31 mai 2007

Un mercredi au boulot

en_voiture

J’ai passé la journée d’hier « sur le terrain », comme on dit au Paideco (programme d’appui aux initiatives de développement communautaire). Notre terrain, qu’est-ce que c’est ? Ce sont deux communes périphériques de la ville de Kinshasa, deux communes dortoirs où viennent se réfugier les familles en situation précaire, aux loyers légers pour portefeuilles ultra-maigres. Ici, à peine quelques centaines de mètres d’asphalte, pas d’eau courante et un réseau d’électricité plus ou moins inexistant. Kisenso et Kimbanseke, les deux communes choisies par le Paideco pour y exercer ses actions de développement, comptent à elles deux un million trois cent mille habitants. A leur tête, deux administrations communales dépourvues de moyens matériel et financier, où corruption et débrouille font office de devise. Non pas parce que les fonctionnaires sont immoraux, mais parce que quand il faut nourrir sa famille, on puise l’argent où on le trouve.

Chacune de ces communes est divisée en quartier. Au sein d’eux, le Paideco a commencé ses activités par l’élection de représentants de la population organisés en groupes : les comités locaux de développement (CLD). Parmi eux on retrouve des représentants des notables, des associations féminines, des ONG, des opérateurs économique, des parents d’élèves, …. Leur raison d’être : à terme, servir de comité consultatif pour les questions liées au développement auprès du conseil communal, une fois que celui-ci aura été élu.

En attendant les élections locales, c’est avec le Paideco qu’ils travaillent, en déterminant les besoins de la population. Pour simplifier, ils décident des actions à entreprendre pour développer leur quartier, et le Paideco les réalise. Il y a des constructions « en dur » (écoles, centres de santé, lutte anti-érosive, …) mais également des formations ou renforcements de capacités (« le soft »). C’est là que moi j’interviens.

Les marchéspr_sidente_comit__gestion_du_march_

Journée d’hier, donc : après avoir passé un mois à faire le tour des CLD pour établir une stratégie de communication pour la commune, les CLD ont choisi plusieurs outils à mettre sur pied afin d’informer le plus grand nombre de gens possibles. Parmi ceux-ci : créer des « radios de marché ». Objectif de la matinée, faire un repérage des marchés de Kisenso pour voir dans quelle mesure il est possible pour le Paideco de financer des radios de marché viable.

Au menu du jour, trois marchés différents. Je pars avec Anderson le chauffeur et François, qui a rendez-vous à Kisenso l’après-midi. On fait d’une pierre deux coups en se partageant la voiture. Passage par la maison communale pour embarquer l’administrateur des marchés qui me fait office de guide et répond à mes 1001 questions.

_talagesSur les marchés, un brin de causette avec les « mamans » du marché (entendez les vendeuses). « Mbote na yo maman, kombo na ngai Charline ya coopération belge » (Bonjour Maman, je m’appelle Charline et je travaille à la coopération belge). Puis c’est Anderson qui enchaîne, car mes dons de lingala ne vont pas au-delà de ça : une radio de marché, cela leur plairait-il ou non ? Quel type d’information voudrait-elles entendre pour les aider dans leur vie quotidienne. Réponse : des informations sur la situation dans le pays, des comptes-rendus des activités communales, de la sensibilisation pour l’éducation, l’assainissement, la santé, le développement économique. Le tout baignant dans des musiques religieuses et des prêches pour mieux faire passer les informations « sérieuses ».

Ici la population est très croyante, peut-être est-ce pour mieux supporter les difficultés de la vie quotidienne. Ces vendeuses n’ont aucune économie, et l’objectif de leur journée est de gagner assez d’argent pour rembourser le crédit du matin (qui a servi à acheter la marchandise) et s’acheter de quoi fournir à leur famille l’unique repas de la journée.

march__Kisenso_Gare

Ci-dessus: le marché de "kisenso gare", un marché "en dur" construit par le Fonds social urbain (FSU, ancêtre du Paideco). Dans d'autres sites, les mamans vendent à même le sol, ou sur des étals en bois. L'objectif en construisant les marchés est de créer un pool de rencontres (au sec), afin de favoriser la communication et l'émergence de groupes d'actions pour le développement. L'objectif est-il rempli? Je n'en sais rien. Mais une chose est sûre, vendeuses et acheteuses gardent les pieds au sec en cas de pluie et ça, c'est déjà une grande avancée!

Quand à moi, sur deux des marchés visités je devrais sans problème créer une radio de marché. Sur le troisième, ça reste à voir car il fait tout de même... 500 mètre de long en restant à deux mètres de la voie ferée.

L'élevage de poules pondeusesles_poulettes

Retour à la commune pour changer de « guide », le responsable du service communal ‘développement économique’ prend la place de l’administrateur des marchés à nos côtés dans la voiture. Cette fois, c’est François qui prend la main, moi je me contente d’observer. Tout comme moi qui suis chargée de développer la communication dans la commune, lui a en charge le développement économique de Kisenso. Tout un programme. Parmi ses activités, François passe un bon bout de temps à visiter les rares « entreprises » ou associations professionnelles qui fonctionnent dans dans la commune. Aujourd’hui, ce sera une ferme avicole (400 œufs par jour), au fin fond de Kisenso. Ted, l’exploitant, voulait élever sa volaille en pleine terre, mais dans cette zone marécageuse où les inondations sont nombreuses, mieux valait que les poules gardent les pattes en l’air. Ted a acheté cette batterie pour 2000 euros, un occasion venue d’Europe.

au_dessus_de_la_digueEnsuite, petit tour du propriétaire : Ted nous emmène aux limites de sa parcelle, héritage de son père. Au bout, une digue (construite par le Paideco) pour éviter les inondations et l’ensablement (voir photo de la maison). Derrière cette digue, la rivière N’djili, frontière entre la commune de Kisenso et de N’djili. Ici, les hommes se baignent, les femmes font la lessive, la vaisselle ou lavent leurs enfants.

Il est 16h30, nous sommes morts de faim. On s’arrête 15 minutes __la_flottepour boire un « sucré » (coca, fanta) avant de reprendre le chemin du bureau. On rentre les chaussures pleines de sable et de boue, crevés, mais des journées comme celles-ci moi j’en veux bien tous les jours !

maison_enfouie

la_N_djili

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